dimanche 7 août 2011

L'Atrium et le lieu de prière

L’atrium était autrefois la pièce principale de la maison romaine. Il est devenu ensuite l’enceinte extérieure de la basilique chrétienne réservée aux catéchumènes (personnes non encore baptisées ne pouvant ainsi participer aux Saints Mystères).



Ce terme architectural a été par ailleurs repris par Maria Montessori pour servir de concept à l’élaboration du « milieu favorable » à l’éducation religieuse. Afin de pouvoir participer au Culte de l’Eglise, il convient d'abord d’en apprendre tout le cérémonial pour favoriser une participation active lors de son déploiement au fil de l'année liturgique.

Réflexions bibliques sur le lieu de prière

Toute la Liturgie de l’Eglise, véritable pédagogie d’initiation au dialogue avec Dieu, trouve son origine dans les textes fondamentaux de l’Exode. A y regarder de près, il semble que la sortie d’Egypte ait un but beaucoup plus important que celui d’atteindre la Terre promise géographique. Dans le conflit qui l’oppose à Moïse, Pharaon reçoit l’ordre suivant : « Laisse partir mon peuple, qu’il me rendre un culte dans le désert » (Ex, 7,16). On voit bien dans ce passage que l’objectif principal de l’Exode est l’adoration dans la forme liturgique que Dieu proposera ensuite à son Peuple. La Bible récapitule ainsi toute une pédagogie divine qui vise à enseigner à l’homme les chemins de sa relation à Dieu.

Avant de se révéler à Moïse, Dieu prépare son élu en lui permettant de développer progressivement une prise de conscience qui le rende apte au dialogue avec Lui. Il est intéressant de noter que la Liturgie de l’Eglise, dans sa structure fondamentale, n’a fait que se calquer sur cette pédagogie divine. C’est ce que rappelle Hélène Lubienska, disciple de Maria Montessori et spécialiste de la pédagogie religieuse, dans son ouvrage «la Liturgie du Geste».

Reprenons le texte et relevons-en avec elle les traits essentiels (Ex, 3, 1-6) :
  1. Dieu ne se laisse connaître que dans un lieu propice au recueillement (en l’occurrence le désert). La Liturgie s’attache toujours d’abord à aménager ce lieu en jouant notamment sur la tension obscurité/lumière
  2. L’Ange de Yahvé apparaît à Moïse dans une flamme. Le Pédagogue divin éveille la conscience de son serviteur en interpellant ses sens qui sont les fenêtres de l’âme comme le rappelle saint Thomas. La Liturgie s’appuie sur tous les stimulants sensoriels possibles pour éveiller la conscience des fidèles : regard, ouïe, odorat sont marqués par des impressions dont la nature symbolique est propre à élever l’âme... du visible vers l’Invisible…
  3. Moïse dit ensuite : « je veux me retourner pour voir cette vision ». La conscience ayant été éveillée, le fidèle, tout comme Moïse, se détourne du monde éphémère et se dispose à entendre l’appel de Dieu.
  4. Dieu appel Moïse qui répond immédiatement « Me voici ». Ayant été bien préparé la conscience acquiesce généreusement à cet appel vibrant.
  5. Dieu ajoute ensuite : « Ne t’approche pas d’ici, ôte les sandales de tes pieds ». Dieu ne se laisse saisir que par le truchement de rites qui empoignent l’homme corps, âme et esprit pour l’ouvrir progressivement aux profondeurs de sa Miséricorde. Les rites liturgiques (décrits notamment en rouge dans le Missel) enseignent à l’homme l’attitude physico-psychique qui peut permettre à son esprit de s’ouvrir à la Présence de Dieu.
  6. Dieu conclut cette séquence en se révélant : « Je suis le Dieu de ton Père, le Dieu d’Abraham, d’Isaac et de Jacob ». On voit comment les rites que Dieu propose à l’homme (« ôte tes sandales »), le conduise à la connaissance intime de sa Présence.
On notera donc comment ces éléments de pédagogie divine structurent la vie Liturgique de l’Eglise et combien donc cette Liturgie est d’essence biblique.

Pour favoriser le développement spirituel des enfants et leur donner l’occasion de rencontrer Dieu, il convient de leur créer ce milieu favorable en s’inspirant de la structure biblique décrite précédemment. Chaque parent peut en concevoir le plan en respectant les éléments de la pédagogie divine : un lieu propice au recueillement qui provoque un « étonnement » sensoriel et qui exige une tenue faite de vigilance. Pour que les plus petits puissent s’approprier ce lieu de prière, il est bon d’y disposer quelques belles images ou statuettes qu’ils pourront manipuler à leur guise. Ce lieu prendra de préférence une ressemblance avec l’Eglise et notamment son point focal qu’est l’autel.

Petite application pratique de la mise en place d'un atrium

Nous avons réalisé le nôtre de la façon suivante : un petit autel couvert d’une nappe qui change suivant le temps liturgique, un grand tableau du Bon Pasteur, une petite croix en émail, un berger et un mouton, deux cierges et un petit palmier. Chaque objet à une valeur symbolique pour orienter l’esprit et lui ouvrir un chemin de contemplation.



Le bon Pasteur : pour les Pères de l’Eglise, la parabole de la brebis perdue est certainement celle qui évoque le mieux cet Amour de Dieu qui guide et qui protège. Le bon Pasteur porte chacun d’entre nous. L’enfant en regardant cette image découvre déjà la personnalité de Celui qui sera le Chemin de sa vie spirituelle. Petit à petit, il comprendra que le Christ Bon Berger est cet Homme-Dieu qui souhaite emmener chaque être humain pour le ramener à la maison du Père en qui réside le principe de toute chose.


La croix : elle est à la fois le résumé de la foi chrétienne et son signe fondamental. Elle récapitule toute l’histoire sainte et celle du cosmos en étant cet Arbre de vie dont la Miséricorde « ouvrit les bras et embrassa le cercle de la terre » (Grégoire de Nysse). Elle est le signe par lequel nous appelons sur nous toutes les bénédictions de Dieu.

Le Berger : figure religieuse de la Bible, il représente l’homme non sédentaire, celui qui est capable de quitter sa terre comme Abraham pour partir à la rencontre de Dieu. Il symbolise aussi l’homme qui veille, le sage qui sait voir car il reste éveillé.


symbole de l’ascension spirituelle, la bougie allumée nous rappelle notre besoin de « verticalité ». Deux bougies éclairent ce lieu de retraite, car chaque nombre dans la Bible renvoie à une lettre de l’alphabet hébraïque. Chacune comporte une signification spirituelle. Le nombre "deux" renvoie à la lettre «Beit». La signification archaïque de cette lettre est la maison (Bethléem, la maison du pain), ce lieu qui réunit l’amour de l’homme et de la femme, impliquant l’intimité et l’ouverture vers l’infini. C’est la première lettre de la Bible qui en résume toute la portée en rappelant le prologue de l’Evangile de saint Jean : Dans le principe est l’Amour…

Le palmier : « les justes croissent comme le palmier » nous enseigne le psaume 92 de la Bible. Le palmier ne doit sa survie qu’à la présence d’une nappe d’eau dans le désert. Cet arbre vigoureux et élancé offre au voyageur toutes les vertus nutritives dont il a besoin pour poursuivre sa marche. Ses caractéristiques en font l’un des symboles majeurs de la vie chrétienne. Ses profondes racines font sa force et lui permettent de conserver ses palmes toujours vertes malgré la chaleur. Son écorce extérieure est rude mais son cœur est tendre. C’est un arbre protecteur dont la haute stature permet la floraison d’autres arbres et cultures (orangers, abricotiers oliviers, etc) Par sa présence visible dans le désert, il indique au voyageur la présence de l’eau qui désaltère.

Ce petit Atrium ressemble donc à un petit guide spirituel vivant. Chaque symbole est un point d’appui. Pour l’adulte le geste traduit un état d’âme. Pour l’enfant, chaque geste lui enseigne une disposition spirituelle qu’il ne pourrait assimiler par des paroles.

Quelques petits rites viennent rythmer ce moment de calme. Chacun prend son coussin pour s’agenouiller. La lumière paisible des cierges invite à retrouver l’essentiel. Quelques chants, quelques paroles d’actions de grâce, un baiser de la croix, et du silence avant qu’un petit souffle vienne endormir la flamme invitant chacun à profiter du mystère de la nuit.

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